23
Nov
2013

L'administration ne peut contester les montages fiscaux des entreprises multinationales au titre de l'abus de droit que si le montage a pour but « exclusif » d'échapper à l'impôt. Pour une entreprise qui délocalise dans un paradis fiscal, ou dans un pays étape vers un paradis fiscal, il est assez aisé d'avancer l'existence d'un autre élément, et de faire ainsi obstacle à l'application de l'abus de droit. Mon amendement proposant de remplacer le mot « exclusivement » par «principalement » a donc fait l'objet d'un long débat dans l'hémicycle, dont de courts extraits vidéos éclairent les principaux points.

Dans sa réponse, le ministre, tout en s'en remettant à la sagesse de l'assemblée (c'est-à-dire en ne donnant pas d'indication sur le vote), a mis en en avant le risque d'insécurité juridique en soulignant notamment que l'on passerait ainsi « d'une question de droit précise – le but fiscal est-il ou non exclusif ? – à une question de fait – le but fiscal est-il ou non principal ? » (cf video)


Débat abus de droit (1) - Muet, Cazeneuve... par pamuet

Le président de la commission des finances, Gilles Carrez, tout en soulignant le fait qu'il était initialement favorable à cette proposition issue du rapport Muet-Woerth, a fait état des critiques d'Olivier Fouquet en citant notamment le passage suivant de son article: « Que fait aujourd'hui le Conseil d'État pour apprécier si le seul motif d'une opération est fiscal ? Il compare l'avantage économique et l'avantage fiscal retirés respectivement par le contribuable de l'opération critiquée. Si l'avantage fiscal est prépondérant par rapport à l'avantage économique, il considère que le contribuable a été inspiré par un motif exclusivement fiscal. ».

Un texte assez étonnant puisque si les mots ont un sens, un motif prépondérant n'est pas un motif exclusif mais un motif principal, de sorte que la jurisprudence du Conseil d'Etat se trouverait ainsi plutôt confortée par la volonté exprimée par le Parlement. L'article d Olivier Fouquet développe en effet deux propos contradictoires. D'un côté, il estime que la rédaction proposée par l'amendement est très dangereuse, et de l'autre, qu'elle n'est au fond pas nécessaire puisque la rédaction actuelle signifie « principalement ». Puisque les mots ont un sens, utilisons-les à bon escient et c'est à nous, représentants du peuple, de dire de quelle façon doit évoluer le droit. Quant à la cour de justice européenne, elle a utilisé par deux fois le terme anglais « essential ». Certains voudraient nous faire croire que la Cour voulait dire « exclusivement » alors que le terme anglais « essential » n'a que deux traductions en français : «essentiel» et «principal». La même idée a donc produit deux amendements : l'un, présenté par M. Marini et adopté à l'unanimité au Sénat, emploie le mot « essentiel » ; l'autre, le mien, utilise le mot « principal » et a été voté par l'Assemblée sans une seule voix d'opposition. La vidéo ci-joint résume cet échange entre Gilles Carrez, Valérie Rabault et moi.


Débat abus de droit (2) - Carrez, Muet, Rabault... by pamuet

Enfin, dans la suite de cette note, le compte rendu intégral du débat.

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19
Nov
2013

Le Premier Ministre a annoncé ce matin que le gouvernement engagerait "une remise à plat de l'ensemble de la fiscalité", y compris la réforme de l'impôt sur le revenu. Dans le cadre du débat sur le projet de loi de finances pour 2014, j'étais intervenu, le 17 octobre, sur ce thème. La France a en effet une particularité : elle a deux impôts sur le revenu. L'impôt sur le revenu proprement dit, qui est progressif mais ne représente que 3 % du revenu, et la CSG qui est un impôt proportionnel et représente 8 % du revenu. La somme des deux est comparable au poids de l'impôt sur le revenu dans les autres pays (autour de 10 % du revenu), mais la particularité de notre pays est que l'impôt le plus important – la CSG – n'est pas progressif.

 


Pierre Alain Muet intervention sur la réforme... par pamuet

« Il est faux de dire que seule la moitié des Français payent l'impôt sur le revenu, puisque tous payent la CSG, et la réforme qui s'impose est de fusionner à terme ces deux impôts pour en faire un impôt progressif dont le poids soit comparable à ce qu'il est dans les autres pays. Il y a deux solutions. La première est celle de Piketty : on fait une nuit du 4 août en intégrant l'impôt sur le revenu dans la CSG, ce qui donnerait une assiette élargie et moins mitée, et puis l'on rend progressive la CSG. C'est très bien sur le papier, mais quand on regarde les choses un peu attentivement – ce fut le cas dans notre assemblée à travers un excellent rapport de Didier Migaud, en 2007, et j'ai moi-même écrit deux ans plus tard un livre qui en est très proche, Un impôt citoyen sur le revenu –, l'on s'aperçoit que plusieurs étapes sont nécessaires.

Nous avons en effet deux impôts très différents, l'un prélevé à la source et individualisé – la CSG –, l'autre prélevé ex post, à partir d'une déclaration, et familiarisé. La première étape consiste donc à mettre tous les revenus au barème de l'IR. C'est ce que nous avons fait. Après cette étape essentielle, il s'agit de rapprocher ces deux impôts pour, à terme, les fusionner. Cela prendra plusieurs années, mais je trouve que cette réforme mérite d'être menée à bien pour une raison très simple : notre impôt sur le revenu a été créé dans les années 1920, à une époque où la famille n'avait pas les mêmes caractéristiques qu'aujourd'hui. C'est l'honneur de la gauche et du Président de la République d'avoir lancé ce grand débat et j'espère que nous irons au bout, peut-être d'ici à la fin du quinquennat. »

18
Nov
2013

Mes amendements pour lutter contre l'optimisation fiscale des entreprises multinationales ont tous été adoptés lors de la dernière séance du budget, malgré le lobbying intense des organisations des grandes entreprises. L'amendement le plus important concerne la modification d'un mot dans le Livre des Procédures Fiscales pour faciliter les redressements fiscaux pour abus de droit (voir ci-dessous interview sur LCP).

 

Une campagne lancée la veille du vote sur internet par l'ONG Avaaz sous le titre « Robin des bois à l'envers » en soutien à cet amendement a recueilli 110 000 signatures au moment du vote. Cette campagne se poursuit pour maintenir la pression citoyenne en vue des prochaines étapes. Vous pouvez la signer sur le site Avaaz.

06
Nov
2013

Les financements alloués à la culture constituent des investissements fondamentaux, au même titre que ceux consacrés au système éducatif, à l'enseignement supérieur ou encore à la recherche. C'est cette conception qui avait conduit au doublement du budget de la culture dans les quatre premières années de la présidence de François Mitterrand et à son augmentation sous tous les gouvernements de Gauche précédents.

En outre, une partie importante des dépenses culturelles et notamment celles qui concernent le spectacle vivant, sont soumises à ce que les économistes appellent la « Loi de Baumol ». Les gains de productivité du travail y sont quasiment inexistants : la représentation du « Médecin malgré lui » ou l'interprétation de la « Flute enchantée » nécessitent à peu près la même quantité de travail qu'à l'époque de Molière ou de Mozart, alors même qu'on produit 20 fois plus de biens aujourd'hui en une heure de travail qu'au début de la révolution industrielle et que les salaires ont augmenté dans les mêmes proportions. En d'autres termes, ce secteur est confronté par essence à des coûts croissants, de sorte qu'on ne peut le préserver qu'en acceptant non seulement un financement public important mais aussi croissant.

 


Pierre Alain Muet, intervention sur le budget... par pamuet

Je n'ignore pas la nécessité du redressement des comptes publics et j'ai approuvé la réduction forte et sélective des dépenses publiques conduite depuis 2 ans par le gouvernement, bien plus pertinente que le rabot uniforme du gouvernement qui l'a précédé. C'est précisément au nom de cette sélectivité, que je plaide inlassablement pour que le budget de la culture soit sanctuarisé, au même titre que celui de l'éducation et de la recherche.

La baisse du budget de la culture représente une goutte d'eau dans l'océan des déficits hérités de l'ancienne majorité. Mais cette goutte minuscule à l'échelle de nos déficits, peut avoir des effets considérables sur la créativité de notre pays. Quand André Malraux défendait en 1966 dans notre assemblée la création des maisons de la culture dans les départements, il eût cette comparaison, je le cite : « Mesdames et messieurs, ce que je vous demande c'est 25 kilomètres d'autoroute ».

Prolonger sur plusieurs années la baisse du budget de la culture serait un non-sens économique. C'est pourquoi je souhaite que le prochain budget marque un net changement d'orientation dans ce domaine.

21
Oct
2013

En matière de lutte contre le réchauffement climatique, ni la volonté politique, ni les changements technologiques, ni même la mobilisation citoyenne ne changeront les choses si l'on n'augmente pas régulièrement et de façon continue le prix du carbone fossile. C'est pourquoi je suis intervenu pour soutenir la mise en place d'une « composante carbone » dans la fiscalité énergétique qui, tirant les leçons des échecs passés (la TGAP énergie en 2001 et la taxe carbone en 2010), commence à un niveau faible mais augmente rapidement et deviendra une véritable « contribution climat énergie » lorsque son augmentation sera pérennisée.

Ci-joint, mon intervention sur ce sujet dans le débat budgétaire.

 


Pierre Alain Muet, intervention sur la... par pamuet

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