La TVA Sarkozy : une triple erreur et une injustice

21
Fév
2012


Explication de vote sur le collectif budgétaire 2012 (TVA sociale) par pamuet

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M. Pierre-Alain Muet. Monsieur le président, madame la ministre du budget, mes chers collègues de la majorité, avec ce transfert de cotisations patronales sur la TVA, vous commettez une triple erreur et une injustice.

La première erreur porte sur le diagnostic : le manque de compétitivité vis-à-vis de nos partenaires européens ne tient pas au coût du travail. Le salaire horaire est le même qu'en Allemagne,...

M. Franck Gilard. Charges comprises ?

M. Pierre-Alain Muet. ...la durée du travail, de 38 heures en France, est plus élevée qu'en Allemagne, où elle est de 35 heures et demie, et la productivité du travail y est plus forte. Quant à concurrencer les pays où les salaires sont dix fois inférieurs, ce ne sont pas des mesures agissant sur le coût du travail qui aideront à y parvenir. Le secret de la compétitivité tient à l'innovation et, comme en Allemagne, à la spécialisation dans des produits haut de gamme. Autant de facteurs que vous n'avez pas pris en compte dans vos politiques.

La deuxième erreur est de nature économique. Si cette mesure doit avoir un effet sur la compétitivité, c'est parce que le salaire réel aura baissé. Ce transfert, à la façon d'une dévaluation, entraînera une baisse du revenu des ménages. Résultat : dans une situation telle que nous la connaissons, où la croissance est très lente parce que le revenu des ménages n'augmente pas, vous enfoncerez un peu plus notre pays dans une croissance faible, voire dans la récession.

...

M. Pierre-Alain Muet. D'ailleurs, comment le Président de la République a-t-il pu proposer cette mesure, lui qui expliquait en 2004, alors qu'il était ministre des finances, qu'une TVA sociale équivalant à un point supplémentaire conduirait à une réduction de la croissance de 0,5 point, le pouvoir d'achat du salaire réel baissant sous le coup de la hausse des prix ? Comment peut-il prendre une telle mesure dans la conjoncture actuelle ?

En vous trompant de cible, vous arrosez le sable ! Seulement 3,3 milliards, sur les 13 milliards que coûtera cette mesure, iront à l'industrie ; le reste permettra en grande partie d'alléger les cotisations dans des secteurs non soumis à la concurrence. Vous ne visez donc pas le renforcement de la compétitivité, mais une nouvelle baisse des charges salariales. Qui plus est, celle-ci aura des résultats moindres que les précédentes, puisque les allègements les plus efficaces, au niveau du SMIC, existent déjà.

Troisièmement, vous commettez une erreur politique en faisant payer par les familles les cotisations patronales destinées à financer la politique familiale. Vous rompez ainsi le pacte social, provoquant la plus grande remise en cause de la politique familiale jamais vue depuis la Libération !

Enfin, cette mesure est injuste : la TVA pèse trois fois plus dans le budget d'une famille modeste que dans le budget d'une famille aisée, laquelle épargne une grande partie de son revenu. Quant aux retraités, vous leur ferez payer une deuxième fois des cotisations dont ils se sont déjà acquittés tout au long de leur vie active.

C'est la troisième augmentation de TVA : 13 milliards d'euros... cela vous rappelle-t-il quelque chose ?

M. Jean Mallot. Oh que oui !

M. Pierre-Alain Muet. Le paquet fiscal ! Voici comment votre politique peut être résumée : lorsque tout allait bien, les plus fortunés de nos concitoyens recevaient la majeure partie des 13 milliards d'euros de cadeaux fiscaux ; aujourd'hui, ce sont tous les Français, et notamment les plus modestes, qui vont payer la hausse de la TVA.

Ce nouveau plan de rigueur, le troisième, signe la faillite d'un président qui voulait récompenser le travail et rétablir le plein emploi, mais qui n'a récompensé que la rente, qui a laissé exploser le chômage et fait aujourd'hui payer aux plus modestes le prix de sa politique irresponsable. Un président qui, sur la scène internationale et européenne, promettait la fin des paradis fiscaux, la régulation financière, les eurobonds, la taxation des transactions financières, mais qui n'aura rien tenu et rien obtenu, et qui tente de faire oublier son bilan calamiteux par un traité européen qui ne règle rien et par un impôt de bourse qu'il rétablit après l'avoir supprimé, prétendant qu'il s'agit là d'une taxe sur les transactions financières.

Nos voisins britanniques, farouchement opposés à toute taxe sur les transactions financières, auront raison de se réjouir de voir la France les rejoindre avec un impôt quatre fois plus faible que le stamp duty et concluront que cela ne vaut pas la peine de continuer à taxer les transactions financières. D'une certaine façon, cette mesure, arrêtée pour des raisons purement électorales, aura fait capoter un véritable projet européen.

Enfin, il est profondément choquant de voir un président se livrer, à trois mois de l'élection, à une telle fuite en avant et accumuler des mesures aussi aberrantes qu'inefficaces. Pour toutes ces raisons, notre groupe votera contre ce projet de loi (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)