Le revenu universel ne crée pas une France d'assistés mais revalorise au contraire le travail

06
Avr
2017

J'étais l'invité de RCF (Radio Chrétienne Francophone) ce jeudi matin pour m'exprimer sur le revenu universel et le programme économique de Benoît Hamon :

 

La mesure dont on parle le plus dans le programme de Benoît Hamon, c'est le revenu universel.
"Le revenu universel, c'est l'assurance que quels que soient les accidents de la vie, le revenu d'une personne ne sera jamais inférieur à 600 euros. Et cela de façon automatique, contrairement au RSA ou à la prime d'activité qu'il faut demander. Cette mesure est introduite dans l'impôt sur le revenu. C'est donc à la fois un revenu pour ceux qui n'en ont pas d'autre, mais c'est aussi un travail mieux rémunéré et mieux considéré, qui va par exemple faire passer le salaire minimum net de 1150 euros à 1350 euros sans affecter le salaire brut, c'est à dire sans affecter la compétitivité des entreprises."

Certains contradicteurs affirment que le revenu universel pourrait créer une France d'assistés.
"Elle ne fera pas une France d'assistés car cette mesure est complètement articulée avec les revenus du travail. Si on se contentait de verser ce revenu à ceux qui n'ont pas d'activités sans se poser la question de son raccord avec l'activité économique - avec ce qu'on touche quand on travaille - il y aurait ce risque, mais ce n'est pas le cas. Cette mesure est tout autant une revalorisation du travail qu'une mesure qui rend universel ce qui existait, c'est à dire le RSA."

Reste alors la question du financement.
"En net, elle coûte 35 milliards d'euros. C'est effectivement la mesure la plus coûteuse du programme de Benoît Hamon. Elle est financée à la fois par la réduction des allègements des entreprises, qui sont mal ciblés, mais également par la croissance que va générer la mesure. Elle creusera un peu le déficit au départ, mais en fin de période on revient à un même niveau de déficit, et entre temps, nous aurons créé de la croissance et beaucoup d'emplois".

En termes économiques, Benoît Hamon parie sur la relance de la demande et la hausse des recettes fiscales.
"On va creuser le déficit en début de période. Il n'y a pas de miracles en économie. Mais cela aura des effets positifs sur l'économie dans la mesure où les entreprises ont besoin de plus de demande. Cela va creuser le déficit durant deux ans, on aura un déficit qui repassera au dessus de la barre des 3% (autour de 3,4 / 3,5%), mais la contrepartie, c'est qu'on aura plus de croissance et de création d'emplois, et donc à terme - au bout de 3 ans - on revient à la situation initiale en terme de déficit, mais avec des emplois créés, des revenus plus élevés, et une croissance plus forte."

Côté politique européenne, un sujet a enflammé le dernier débat télévisé, celui des travailleurs détachés.
"Il faut que les travailleurs détachés soient employés dans les mêmes conditions que les travailleurs français. Il faut simplement que quand des travailleurs détachés viennent en France, la législation française soit respectée par les entreprises qui les emploient".

Et en matière de politique familiale?
"Benoît Hamon va d'abord mettre en place les allocations familiales dès le premier enfant, car il n'y a aucune raison de traiter les enfants différemment. On va également ouvrir la possibilité d'individualiser l'impôt pour les couples. Ceux-ci auront donc le choix entre l'individualisation de l'impôt ou l'imposition conjugale. Et comme on réforme profondément la prime d'activité - qui va disparaître et être remplacée par le revenu universel - pour les personnes qui ont des faibles revenus et qui touchent le RSA, la conception familiale qu'on introduit est celle de l'impôt sur le revenu. Vous savez que pour le RSA, la conception actuelle de la famille est que le conjoint ne compte que pour une demi-part. Dans l'impôt sur le revenu, le conjoint compte évidemment pour une part, et c'est ce que nous allons mettre en place. Cela aboutira à un résultat important : aujourd'hui la prime d'activité (qui est relativement importante si on la demande) est de 130 euros quand vous avez un salaire au SMIC. Si vous êtes deux célibataires, vous touchez chacun cette aide si vous la demandez, mais si vous vous mariez, vous ne les touchez plus ! Avec notre réforme, un salarié au smic touchera 200 euros de salaire net, qu'il soit célibataire ou marié.

Justement vous parlez de mariage... certains candidats parlent d'abroger ou de réécrire la loi Taubira ?
"Cette loi est une grande avancée vers l'égalité, je pense que personne ne reviendra dessus, la question ne se posera pas. En revanche il faut ouvrir la PMA aux femmes seules, pour des raisons d'égalité. Mais sur tous ces sujets, l'important est de laisser le débat démocratique se développer, car on voit bien à travers ces grands débats de société qu'ils ne recoupent pas les clivages politiques traditionnels, et que chacun s'exprime en fonction de ses propres convictions - et c'est le rôle des parlementaires de le faire".